Les pépites du numérique bientôt mieux valorisées que les sociétés du CAC40 ?

A l’occasion de ses vœux à la presse, le secrétaire d’Etat au numérique Cédric O est revenu sur la place croissante du numérique dans l’économie et la nécessité de faire émerger des champions. Au vu de l’évolution de l’économie et de l’importance grandissante prise par des sociétés tech, le sujet de la fracture numérique est également essentiel.

« La France est au seuil d’un grand bouleversement, d’un phénomène de remplacement qu’ont déjà observé les Etats-Unis qui ont vu dans les 10 dernières années de très nombreuses grandes entreprises qu’ils connaissaient être remplacées par de nouvelles entreprises nées il y a moins de 25 ans« , selon Cédric O.

Un bouleversement visible à l’échelle mondiale. « Sur les dix plus grosses entreprises mondiales cotées, huit sont dans la tech, six ont moins de 30 ans. Mais pas une seule n’est européenne », affirme le secrétaire d’Etat au numérique qui s’exprimait jeudi 20 janvier 2022 à l’occasion de ses vœux à la presse. L’Europe n’a pas encore connu ce bouleversement notamment parce que la culture y est différente et les règles (qui diffèrent elles aussi) y engendrent une certaine stabilité.

MA BONNE DYNAMIQUE DE LA FRENCH TECH

« Le Covid-19 a été un catalyseur qui précipitera dans les années qui viennent ces mouvements de successions, de bouleversements, qui sont assez réguliers dans l’histoire économique du monde », assure Cédric O. Par exemple, lors de la mécanisation des 19ème et 20ème siècles, les draperies qui étaient auparavant des acteurs majeurs ont été remplacées par de nouvelles entreprises en l’espace de 10 ans.

Cette révolution est désormais incarnée positivement par la croissance de la French Tech et, à l’inverse, par les difficultés de certains grands groupes historiques. « Aujourd’hui il suffit d’être valorisé 10 milliards d’euros pour entrer au CAC40 alors que Back Market a été valorisé à 5,1 milliards d’euros lors de sa dernière levée de fonds », cite Cédric O.

Au cœur du sujet : les licornes, ces sociétés technologiques non-cotées valorisées plus d’un milliard de dollars. « Le succès économique récent de la French Tech est essentiel, car ce sujet détermine les autres », assure Cédric O. La réussite des entreprises du numérique permettra de renforcer l’économie et la souveraineté, de mettre en avant les valeurs européennes et de fixer les standards, puisque pour établir les nouvelles règles dans un secteur émergent il faut y avoir des champions.

Le renforcement de l’écosystème de la French Tech bénéficie également aux grands groupes en les poussant à se transformer. Comme le rappelle Cédric O, faire émerger de nouveaux champions ne veut pas dire que les autres entreprises qui ont réussi vont y laisser leur place. LVMH et Safran sont déjà des champions dans leurs secteurs et vont le rester. Cependant pour asseoir leur statut, il est important qu’ils mènent cette course technologique et cette transformation économique. Les nouveaux champions devront d’ailleurs aussi permettre aux PME et TPE de se transformer, que ce soit par l’exemple ou en leur fournissant de nouveaux outils et services.

LA LUTTE CONTRE LA FRACTURE NUMÉRIQUE

A ce niveau, la lutte contre la fracture numérique devient essentielle. « Le but n’est pas de ralentir la transition numérique mais de faire en sorte que tout le monde puisse s’y retrouver », assure Cédric O. Ce sujet doit être regardé bien au-delà des questions de raccordement à la fibre et de couverture du réseau cellulaire.

L’idée est de permettre à tout le monde de comprendre la transition économique et d’en saisir les enjeux. La lutte contre cette fracture est large et va d’apprendre à allumer un ordinateur jusqu’aux sujets de parentalité à l’heure du numérique. « Pour reprendre les termes de Gilbert Simondon, la culture numérique française est faible », selon Cédric O, et cela se fait ressentir. Par exemple, « dans les compte-rendus des cahiers de doléances des gilets jaunes, le numérique est mentionné comme un facteur de déclassement ».

Ce qui a été initié avec les conseillers numériques et les guichets France services n’est que le début. La question de l’éducation et de la formation est également devenue centrale. « Sur la fracture numérique nous devons aller plus loin, pour que la ‘grammaire numérique’ moyenne des français soit plus élevée », résume Cédric O. D’autant plus qu’à clé il y a également des emplois. Si on a 300 000 développeurs en France, il en manque encore 200 000. Toutefois, le secrétaire d’Etat déplore « l’absence du sujet numérique dans la campagne électorale en cours ». Une façon pour lui de mettre en avant le bilan d’Emmanuel Macron et d’esquisser son éventuel programme s’il venait à annoncer sa candidature à l’élection présidentielle.

Source : «www.usine-digitale.fr» du 21/01/2022